Robin n'est décidément pas le genre d'individu qui se retiendra en public. Dénué de bonnes manières et de tout sens moral, il dit ce qu'il pense et fait ce qui lui chante sans se soucier de ce que peut penser le reste du monde. Tout à fait inconscient, il ne se rend pas encore bien compte des dangers qui l'entourent et abordera n'importe quel autre chien sans même se demander si celui-ci peut-être dangereux. Sociable et a priori engageant, il est maître dans les arts du langage et excelle à gagner la confiance des autres, entamant des conversations sur à peu près n'importe quel sujet et jouant de son charme pour détendre l'atmosphère.Pourtant, le cabot est loin de coller à cette image de chiot sympathique que les inconnus ont tendance à lui donner. S'il semble afficher une face innocente et enjouée en permanence, il est en réaliste égoïste et calculateur. Non seulement il vous laissera crever pour sauver sa peau, mais en plus il est fort possible qu'il ait pensé à vous sacrifier à sa place dès votre première rencontre. Clairement, il se fiche pas mal de ce qui peut vous arriver et utilise les gens qui l'entourent afin de s'en sortir. Il est ce genre de personne qui réuni des amis pour se protéger, usant de leur bonté et de leur force pour se créer une véritable armure.S'il ne le crie pas haut et fort, Robin sait très bien qu'il est un enfoiré et vit très bien avec ça : selon lui, c'est bien la meilleure manière de survivre dans ce monde. Faire de ses amis des armes et de ses ennemis des associés est naturel pour lui : il manipule les gens comme des pantins et irait presque jusqu'à prendre du plaisir à observer les gens réagir face à ses pièges. Si cette facette de sa personnalité est loin d'être flagrante -car camouflée à coups de sourires charmeurs-, le fait qu'il soit un peu décalé et qu'il ait probablement une case en moins est bien connu.Si vous rencontrez l'une de ses connaissances, celle-ci vous dira certainement à quel point Robin peut être malicieux. À la fois moqueur et surexcité, il ne se lasse pas de courir, grimper et bondir sur à peu près toutes les plate-formes possibles et cherchera toujours à provoquer une ou deux personnes à l'aide de blagues indécentes et farces enfantines. S'il est un peu déséquilibré et excentrique, il n'en reste pas moins un jeune attachant qui saura facilement vous séduire... Pour mieux vous jeter aux fauves par la suite.
Tout comme l'image qu'il se donne, le physique du jeune n'a rien d'effrayant. Il est loin de ressembler à un énorme molosse, mais il est également impossible de le comparer à un petit roquet. Une taille moyenne, une allure vigoureuse et compacte ainsi qu'un corps musclé et bien proportionné, Robin colle parfaitement à l'idéal de sa race, les retrievers de la Nouvelle-Écosse. Si son jeune âge ne le rend pas encore très imposant, il va sans dire qu'il prendra de la masse en grandissant.Une tête large et anguleuse se dresse sur un long cou dont les poils bouclent légèrement en hiver et deux oreilles triangulaires encadrent son visage, leurs extrémités se redressant parfois dans une mimique stupéfaite. Ses grands yeux arborent une douce couleur amande, brillant d'intelligence et de malice. Sa gueule est longue mais pas trop large, si bien que mâchoires ouvertes et langue pendante, Robin semble esquisser un large sourire. Difficile de ne pas le remarquer avec ce pelage roux flamboyant aux sous-teintes rouges, qui complique parfois ses chasses ou ses tentatives d'être discret. Son poil est riche et imperméable, ce qui lui permet d'affronter le froid des eaux glaciales : c'est d'ailleurs pour cette raison que Robin est friand des baignades et se jettera dans les lacs ou les rivières avec la joie d'un enfant, faisant de lui un excellent nageur.Une fine tâche blanche débute de son museau et s'interrompt au milieu de ses deux yeux, pour continuer en une petite pelote sur le haut de son front. De la même manière, une tâche longiligne occupe le milieu de sa gorge et une autre bien plus large se situe au niveau de son poitrail. Seule sa patte avant droite est dénuée d'une chaussette blanche, toutes les autres se voyant teintée d'une charmante couleur crème.Quelques marques de crocs se dissimulent sous la masse de son pelage, au niveau de ses membres ou de ses flancs, mais rares sont celles qui sont vraiment visibles à part en été, lorsque sa fourrure perd de son épaisseur. À ce moment seulement, les quelques endroits où le poil ne peut plus pousser peuvent être aperçus, mais ils semblent être les seuls résidus d'éventuelles blessures dues au jour de la Fin ou avant.
Je n'ai jamais porté grande importance au passé. Non pas que je cache de lourds secrets, simplement, quand j'y repense, tout me semble avoir été un rêve. C'est comme si toute mon enfance, de ma naissance jusqu'au jour de la Fin, n'était qu'une histoire étrangère que j'avais observé à travers un œil neutre, sans chercher à réagir. C'est comme si celui que j'étais autrefois n'était qu'un étranger dénué d'âme, qui se contentait de subir sa vie davantage que de la vivre. Ainsi, plutôt que de ruminer mes vieux souvenirs, je me contente d'avancer, comme un nouveau personnage né des cendres du dernier, se fichant pas mal de ce qui a pu se passer il y a des années.Peut-être que je n'ai pas tellement envie de me souvenir, finalement.La chaleur d'un foyer:D'aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours fais parti d'une portée nombreuse. Auprès du corps chaud de ma tendre mère, nous étions sept petits chiots roux amassés les uns sur les autres. Quatre mâle, et trois femelles. Là où nous vivions, il faisait bon et le contact chaleureux de ma famille me permettait de dormir sereinement, ignorant les bruits étranges que faisaient les humains non loin de nous. Ma mère était une chienne grande et vigoureuse, qui soignait chacun de nous avec attention, nous tenant parfois à l'écart des mains dénuées de fourrure qui cherchaient à nous attraper. Les grandes silhouettes tordues avaient une voix grave et aboyaient entre eux d'une étrange manière, si bien que j'étais incapable de comprendre leur langage. Chiot, j'étais peureux et maladroit et je me laissais marcher dessus par mes frères et sœurs. J'attrapais rarement la balle quand nous jouions et je préférais mille fois la compagnie de ma mère que celle des individus de mon âge. Alors quand mes frères et sœurs batifolaient entre les jambes des humains, je me contentais de visiter mon monde, qui ne se limitait qu'à une grande maison aux murs immenses. Le sol était souvent jonché de détritus que je me faisais un plaisir de mordiller et peu à peu, je devenais apte à grimper les marches qui menaient aux différents étages. Je ne me souviens plus trop de combien d'humains il y avait dans tout ce remue-ménage : trois, quatre peut-être. Toujours est-il qu'ils passaient rarement de temps avec nous, simples silhouettes qui erraient dans les longs couloirs vides.Le froid de la solitude:« - Bouge toi, Robin ! Allez! »Mes pattes s'emmêlèrent les unes avec les autres et je roulais mollement sur la moquette, me laissant finalement choir à la fin de ma chute. Les rires de mes frères et sœurs résonnèrent dans mes oreilles et je redressais bêtement le museau pour constater leurs visages moqueurs. J'eus à peine le temps de reprendre mes esprits qu'une masse s'écroula sur moi, couvrant mon museau, m'empêchant ainsi de respirer.« - Bouuuh ! Robin est une mauviette ! Robin est une mauviette ! » aboyait une voix hilare alors que je cherchais faiblement à me débarrasser de l'emprise de mon frère.Il s'appelait Combo. C'était l'un de mes frères aîné. Lui et un autre de mes frères, Volt, passaient leur temps à me tourmenter. Quant aux autres, ils préféraient jouer entre eux et ignorer ma présence. Cela n'avait rien de vraiment mauvais : ce n'était que des jeux entre membres de la même portée qui, parfois, tournaient mal. Je ne peux pas dire que je ne le méritais pas : j'étais toujours silencieux et me défendait à peine contre les assauts de mes semblables.C'est d'ailleurs à cette période que certains de mes frères et sœurs commencèrent à quitter la maison. Je ne sais pas vraiment où ils se rendaient, mais lorsqu'ils passaient le pas de la porte, ils ne revenaient plus. Parmi les chiots de ma famille, seuls Combo et Volt restèrent et au final, nous n'étions plus que tous les trois. Ma mère avait fini par partir elle aussi, lorsque nous étions assez grands pour vivre sans elle. Mais sans la protection de ma génitrice, je me sentais abandonné à ces deux géants qui abattaient leur colère sur le misérable cabot que j'étais alors.La bêtise humaine:Les humains avaient commencé à s'occuper un peu plus de nous. Ils nous appelaient par nos noms et nous prenaient en laisse pour nous sortir dehors. Ma maison avait grandi, elle aussi : je découvrais chaque jour de nouveaux endroits et mes maîtres nous emmenaient régulièrement à l'extérieur, où nous pouvions courir et nous défouler.Je ne suis pas vraiment sûr d'avoir aimé mes humains. Ils étaient froids, parlaient fort et ne m'offraient jamais d'affection. Comparés à ma mère, ils étaient vides. Ils ignoraient mes jappements et m'écartaient quand je recherchais leur caresse, du revers de la main parfois, d'un coup de pied souvent. Ils essayaient de m'apprendre des tours dont je ne voyais pas l'utilité, comme d'aller chercher des choses à l'odeur et les leur rapporter. Si ce n'était que de temps en temps au début, je compris bien vite que cela allait constituer le reste de ma vie : tous les jours, nous partions dans la nature avec mes frères, et nous étions entraînés.Ainsi, à chaque fois que je rapportais ce que l'on me demandait, j'étais récompensé. Je ne sais pas vraiment pourquoi je devais faire ça, mais je le faisais. Mes confrères semblaient prendre le goût de la compétition, tandis que j'exécutais simplement les ordres. Je préférais éviter de désobéir à mes maîtres : je n'aimais pas vraiment quand ils s'énervaient contre moi.Les crocs du serpents:« - Lâche ça, Robin ! Donne-le-moi!»Les crocs. Les aboiements. La douleur. Encore une fois, je tombe sur le flanc, fauché par la mâchoire de Combo, qui s'est jeté sur moi. Il gronde et me regarde de haut alors qu'il saisit l'objet que j'étais censé ramener chez mes maîtres.« - Merci, Robin, vraiment. Je te revaudrais ça, mon frère. » crache-t-il narquoisement avant de s'élancer vers le lieu où se trouve nos maîtres.Au milieu de la forêt, adossé à un arbre, je me relève avec peine, boitillant légèrement. En levant mon antérieur, j'observe les multiples blessures qui le recouvre. Je grimace. Combo n'a jamais été bon pour le rapport : il se contente de courir bêtement et de voler mes prises, récupérant ainsi tous les honneurs auprès de nos humains. Au fond, je me fiche de recevoir l'attention de ces idiots : ils sont bêtes et insensibles et ne semblent même pas s'entendre avec les autres individus de leur espèce.Combo et Volt se battent tout le temps. Entre eux, avec d'autres chiens, et parfois ils s'acharnent sur moi. Ce sont deux abrutis qui aboient trop fort et vantent chacun l'intelligence de l'autre, alors qu'ils sont aussi bêtes que des oiseaux. J'aimerais pouvoir me défendre, mais je suis incapable d'articuler la moindre phrase correcte. Lorsqu'ils se pavanent devant certains de nos semblables, je reste de mon côté à les observer, me lamentant sur ma situation et léchant mes blessures.Le venin des représailles:Le monde tremble. L'air grésille. Le sol se fissure. Les humains courent et hurlent, cherchent à éviter les dommages de la bombe qui s'abat sur eux. Pour moi, c'est la fin du monde. La fin de ce monde de merde et de tous les idiots qui vont avec.Ma maison s'écroule sur elle-même et je dois courir pour éviter de me faire tuer. Mes humains ont déjà disparu sous les décombres et mes frères courent avec moi à travers les ruelles étroites qui se resserrent les unes sur les autres.C'est arrivés dans une impasse que nous arrêtons enfin notre course affolé. Le bruit semble être plus faible et nous pouvons enfin reprendre notre souffle, misérables témoins du désastre de la Fin. Volt a la moitié du visage en sang et son souffle haletant ne présente rien de bon. Sans un mot, nous le voyons tituber et glisser sur le mur, y laissant une longue trace de sang. Son pelage roux a tourné à l'écarlate et ses pattes ne ressemblent plus à des membres normaux tant ils sont déformés. Combo cherche tant bien que mal à le relever, affolé et terrorisé à l'idée de perdre son camarade.Pourtant, je ne ressens que du soulagement. Au milieu de ce monde en ruine, persuadé que je vais mourir, la seule chose que je suis capable de penser est « enfin. ». Enfin le ciel semble avoir pris ma défense. Enfin je ne suis pas celui qui souffre. Enfin ce déchet sans aucune valeur a eu ce qu'il mérite. Mon autre frère lui donne des coups de museaux et couine, cherchant vainement à le réveiller de son sommeil éternel.« - Il s'réveillera pas, Combo, dis-je d'une voix éteinte.- La ferme, Robin ! Aide-moi plutôt à le porter, où il va mourir ! aboie-t-il sans même me regarder.- Il faut qu'on parte.- J'irais pas sans lui !- Alors porte-le tout seul. »Il semble mettre un moment à saisir la gravité de mes paroles, et quand enfin il le réalise et finit par redresser la tête pour me regarder, je lui ai déjà tourné le dos. Je crois que je comprends enfin à quel point son existence est futile : comparé à ma propre survie, la sienne a peu d'intérêt. Il n'est qu'un insecte qui m'a toujours empêché d'avancer, me tournant autour en produisant un son infernal. J'aurais dû me débarrasser de lui bien plus tôt.J'imagine que c'est dans la détresse que Combo a finit par me suivre. Face au corps froid de notre frère, il a dû préférer la compagnie d'un semblable bien vivant, même si cela devait être moi. S'il traînait les pattes au début, il s'est vite ré-approprié le rôle de meneur et avance désormais devant moi, s'arrêtant de temps à autre pour vérifier d'un air inquiet si je le suis toujours. Alors que nous avançons depuis un moment déjà, il finit par se caler à mon allure.« - Hm, au fait, Robin... Tu m'en veux pas, hein ? Je veux dire, tout ça... C'était juste des chamailleries entre nous, on faisait que s'amuser... On est toujours frères, n'est-ce pas ? » Sa voix tremble. Son sourire est immonde. Maintenant que je ne suis plus que sa seule famille, il cherche à obtenir ma confiance. Il veut que, comme Volt, je devienne l'ombre qui le suit. Il veut qu'ensemble, nous devenions de vrais frères, des acolytes qui font tout ensemble. Au début, l'idée me paraît alléchante : enfin je pourrais être celui qui brille à ses côtés, le compagnon qui n'est plus ignoré et qui a une place dans son cœur. Je garde le silence un instant, puis je finis par lui adresser un sourire chaleureux.« - Bien sûr que nous le sommes toujours, mon frère. » Déclarais-je d'une voix mielleuse.Son expression s'illumine et il semble alors réellement heureux. Pourtant, lorsque le mur que nous longeons tremble et que je me faufile derrière lui, me servant de son corps comme d'un bouclier, je ne ressens pas une once de culpabilité. Lorsque son regard trahi et brisé se mêle à ses hurlements effrayés, je ne fais pas un geste, restant silencieux face à ses râles et ses cris.L'hardiesse du délivré:Rencontrer d'autres chiens fut bien plus facile que je ne le pensais. Je n'ai qu'à sourire et me montrer accueillant pour que ces idiots écoutent tout ce que j'ai à dire. Soutirer de la nourriture n'est pas un problème non plus, puisque j'ai su m'entourer de nombreux amis qui m'offrent leur part avec générosité. Je ne les méprise pas pour autant. Disons simplement que je leur suis reconnaissant d'exister, car ainsi ils me permettent de rester en vie.Maintenant que mes maîtres et ma famille ont disparus, je suis libre. Je peux faire ce que je veux et visiter n'importe quel lieu sans que personne ne soit là pour me battre ou me tenir en laisse. Je me rends enfin compte des chaînes pendues à mon cou depuis tout ce temps. Curieusement, celui que j'étais autrefois semble avoir disparu lorsque j'ai laissé mon frère mourir à ma place, abandonnant son cadavre sous les décombres. Les années passées à observer les autres m'ont permis de savoir comment agir avec eux. Je n'irais pas jusqu'à dire que je les comprends : d'une certaine manière, j'en suis incapable.Je ne sais pas néanmoins ce qui est arrivé à mes quatre autres frères et sœurs. Il y a peu de chances qu'ils aient survécu, mais après tout, nous étions une famille nombreuse. De toute façon, ce n'est pas comme si je me préoccupais vraiment de ces moins-que-rien aujourd'hui. Désormais, je n'ai plus peur des chiens qui me persécutaient : je me contente de jouer avec leur vie, les menant au bout d'une laisse comme mes maîtres le faisaient autrefois.
PUF : ShirinePrénom : SophieÂge : 16 ansCe que vous pensez du forum : JVOUS AIME OK